À peine quittée, on se rend compte que les images dont l’île nous a imprégnés sont celles d’une terre de contrastes.

Comme trois lignes de force qui ont guidé notre attention, notre regard s’est posé quelques semaines sur sa nature, son ambiance, son histoire.

Et comme on marie des senteurs de prime à bord opposées, l’île aux épices compose avec les contraires. C’est peut-être là sa magie.

 

Vicissitudes, hommage à la mémoire des esclaves morts durant leur traversée de l’Atlantique. Crédit photo www.puregrenada.com
Un volcan, mais sous l’eau

Kick’em Jenny est un volcan sous-marin bel et bien actif situé au nord-ouest de l’île. Lorsqu’il aborde Grenade par la mer, le navigateur évite le cratère dans un rayon d’1.5 à 5 miles.

En cas d’explosion, on imagine un bateau se prendre une belle ruée. En fait, la composition de l’eau se modifiant, c’est la portance de la coque qui serait menacée.

Onze îles des Antilles sont volcaniques et pour cause : quand la plaque atlantique, plus vieille et donc plus lourde, rencontre la plaque caraïbe, elle se glisse et coule sous celle-ci par subduction.

Par un phénomène de pression et de température, la plaque refond en profondeur.

Il y a ensuite génération de magma qui remonte à la surface, créant un arc volcanique, d’où la topographie de l’arc antillais.

Bien que récemment contredite, il existe une hypothèse selon laquelle le cumul des éruptions du volcan rapproche son sommet de la surface de l’eau ce qui ouvrirait la possibilité de l’émergence d’une nouvelle île à plus ou moins long terme (www.uwiseismic.com).

Grand étang, un ancien cratère à l’intérieur de l’île, offre le spectacle d’un gigantesque œil de vert, cerné par la forêt primaire.
Exubérance et proximité

C’est en se jetant sous ses cascades d’eau fraîche qu’on touche du doigt la beauté de la nature de Grenade.

Immergé dans la végétation luxuriante, on en oublierait presque qu’on n’est qu’à 30 minutes de la route principale et à 1 heure de la capitale Saint-Georges.

 

Tandis que la côte orientale est sculptée par les assauts de l’Atlantique comme toutes les îles des petites Antilles, le sud de l’île est une frange déchiquetée de baies lui donnant une touche nordique plutôt décalée pour les 12èmes degrés nord.

Elles sont essentiellement investies par les plaisanciers qui y trouvent leur éden.

La populaire Prickly Bay


les plages de la côte sous le vent

D’essence généreuse, l’île aux épices ne faillit pas à sa réputation. Girofle, noix de muscade, cannelle, se rencontrent à chaque carrefour.

Pour les inconditionnels de chocolat, impossible de faire l’impasse sur la visite de Belmont Estate, un domaine agricole historique où l’on cultive et transforme les fameuses fèves de cacao.


English way of life, mais lumineux

Hors parade de Carnaval aussi flamboyante que les arbres du même nom, les codes vestimentaires formels (coupes droites, épaules cachées et longueur de jupe aux genoux) traduisent une pudeur plus marquée que sur d’autres îles antillaises. Derrière une certaine réserve, la convivialité était toujours au rendez-vous. Le 100% de nos rencontres ont été marquées par des sourires et de la considération, particulièrement grâce à la présence de notre petit gars.

credit wyntersuncarnivalholidays

Le décor architectural est une rencontre improbable entre style victorien classique et teintes de façades joyeuses et pétantes. Un ingénieur attraperait certainement le vertige en traversant le tunnel de l’île, qui relie la zone du Carénage à la vieille ville, où se frôlent dangereusement voitures et piétons. Dans l’effervescence qui anime une vieille ville bien entretenue, on trouve une organisation épatante des transports publics. Une armada de mini-buses vibrant sur les basses d’une petite musique d’ambiance, regroupés par itinéraire sous un numéro défini, vous emmène en 2 temps 3 mouvements dans chaque coin de l’île pour une bouchée de pain. Cela fonctionne à merveille.

Petite île et grand pouvoir

En parlant d’armée, un navire hôpital de 153 mètres battant pavillon chinois amarré à l’entrée de Saint-Georges, nous a intrigué. D’abord parce qu’il en existe que 3 dans le monde, les 2 autres appartenant aux États-Unis. Ensuite, car on ne peut s’empêcher de s’interroger sur la raison de sa présence, l’empathie étant rarement la motivation de relations diplomatiques en générale et celles des Chinois en particulier.

Poussés par la curiosité, nous sommes passés d’une flânerie feinte à une approche effrontée du bâtiment. Après être passés au détecteur de métaux, un haut gradé nous a chaleureusement reçu pour nous parler du navire : un bijou de technologies qui permet jusqu’à la chirurgie ophtalmique à bord. 500 patients Grenadins seront traités gracieusement en l’espace d’une dizaine de jours.

Soutiens financiers massifs dans le développement à l’agriculture et la lutte anticorruption, financement du stade national de cricket pour 55 millions, la petite île de Grenade, pourtant passablement éloignée des côtes vénézuéliennes, serait-elle une telle place stratégique et financière ?

Difficile de « cracker » les intentions des uns et des autres mais il semblerait effectivement qu’elle présente des attraits suffisamment intéressants pour que la Chine investisse dans le « backyard » ou arrière-cour des USA, à savoir la mer des Caraïbes aussi appelée la Méditerranée américaine.

Rappelons qu’en 1983, ces mêmes US lançait une invasion armée en Grenade, l’opération « Urgent Fury » faisant ainsi une scandaleuse démonstration de force. Sous l’égide de Reagan et dans un contexte de guerre froide, la coopération active du gouvernement socialiste de Maurice Bishop avec Cuba et l’URSS n’était pas pour plaire. En violation flagrante du droit international, c’est la construction de l’aéroport (aujourd’hui nommé Maurice Bishop) qui fournit le prétexte officiel au lancement de l’offensive. Pour le Pentagone, « on y aménageait une base militaire stratégique soviéto-cubaine, menaçant la sécurité des États-Unis ».

Carriacou ou Kari akou, œil du seigneur

Le pays de Grenade regroupe 3 îles. Grenade elle-même, Petite Martinique et Carriacou, pays des récifs. Carriacou est connue du monde de la plaisance pour ses chantiers bon marché. Non moins réputé à Tyrell Bay et loin à la ronde après les pélicans, Dominique et son atelier de soudure sur aluminium flottant.

Ce même Dominique m’expliquait que le gouvernement subventionne l’utilisation de petits poissons dans les cuves de stockage d’eau douce pour qu’ils bouffent les œufs d’insectes, limitant ainsi leur prolifération. À noter qu’à Carriacou, il n’y a pas d’eau douce à l’intérieur de la terre, donc on récupère massivement l’eau de pluie.

l’atelier de soudure alu de Dominique

On a bien aimé faire l’apéro devant le supermarché du coin (les plaisanciers s’y retrouvent car il y a un bon wifi…), grignoter un « roti » dégoulinant de ketchup-mayo en guise de petit-déjeuner (à mi-chemin entre le kebab, le fish & chips et le burger, blurp !) et s’aventurer dans la mangrove.

Sandy island vers Carriacou

On aurait encore voulu voir :

–          Friday’s fish : des vraies brouettes … on est arrivés à
midi quand les festivités démarrent à 17h00…

–          Les pétroglyphes

–          Les sources chaudes

–          Petite Martinique

–          Les singes à Grand Étang

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