TOUT QUITTER – Bilan de notre 1ère année des Antilles à l’Amérique centrale à la voile

PARTIR

Partir …  

Prendre le large, littéralement.  

Tout quitter et réaliser un rêve.  

Avoir du temps et prendre le temps de vivre, simplement.  

Découvrir et s’émerveiller comme des gamins.  

Naviguer et remonter le vent avec un bateau bien réglé.  

Glisser sur les vagues en vent arrière.  

Se faire taner un peu par le vent, les vagues et le soleil.  

Apprécier au centuple le goût des aliments fois le calme revenu après
une navigation mouvementée.  

Se baigner, pêcher et vivre tel les Robinsons !  

Ancrer seuls au monde dans des endroits déserts.  

Admirer le coucher de soleil et les étoiles.  

Se sentir entiers, fiers et heureux d’avoir mené notre barque.  

Décider de partir ou de rester.  

Être tenus par les seules contraintes de la mer.  

Nous sommes en 2014.  
On navigue sur le lac de Neuchâtel sur notre 21 pieds « Modjo » et en mer, en Manche et en Grèce, pendant les vacances. Mais chaque sortie nous bouscule et fait grandir l’envie de voyage à la voile.  

Oui mais … où, comment ?  

On vient du nord vaudois -en Suisse- et personne devant nous pour nous
initier à la vie en mer.  

Alors salons nautiques, recherches internet, conférences, rencontres,
c’est parti …  

Chaque nouvelle information appelle de nouvelles questions. Comment est-ce qu’on pourrait faire nous ?  

On est comme des mômes et plus on avance, plus on s’y voit sur notre
rafiot !  

De l’idée au projet, ce grand voyage en voilier prend forme petit à petit.

Le revenu d’un projet immobilier, des économies et quelques jobs de
rédaction devraient nous permettre de concrétiser le rêve.

Nous sommes en 2016 et il est au centre de nos discussions.  

À ce moment, on est à un tournant dans nos vies professionnelles et la
santé demande qu’on s’occupe d’elle.

Mais surtout, c’est l’arrivée de Valentin qui allume la mèche.  

On n’a pas envie d’en perdre une miette et on se dit qu’on pourrait
s’inventer une vie de famille qui nous ressemble.  

Et là, tout s’emballe ! Plus stressant que réjouissant à vrai dire entre boulot, bébé et préparatifs.

Plus le temps de rêver !  

Bouchées doubles pour

– ficeler notre budget
– régler nos affaires
– affiner notre programme de navigation
– trouver le bon bateau.

C’est décidé, janvier 2017, on lève le camp.

Nous et nos 90 kilos de bagages.

Du rêve à la réalité

La trouvaille de Django nous conduit en Martinique.  

C’est un peu loin de la famille et des copains.

Par contre, c’est pas mal du tout car la zone de navigation des petites Antilles est idéale pour se faire les dents et rencontrer d’autres familles
vivant sur des bateaux.  

Django est un Feeling 39 de 2001, version quillard, du chantier ex-Kirié. C’est un voilier destiné à la grande croisière, parfait pour nous qui
comptons essentiellement rester dans des eaux tempérées et caboter
le long des côtes.  

Tout est facile d’accès. Les agencements sont spacieux et lumineux, et
c’est bien appréciable lorsqu’on y vit.  

Il offre une belle qualité de construction autant en termes de solidité de
la structure et de l’accastillage que de l’équilibre du bateau en marche.   Peu gîtard, il est capable d’accrocher 7 nœuds de moyenne et décolle ses 8 tonnes avec à peine 5 nœuds de vent du travers au près.  

On l’aime notre Django !  

Et donc de Suisse en Martinique, 6 déménagements et passablement de discussions plus tard pour concrétiser l’achat du bateau, enfin on y est !!

On monte sur notre bateau à la marina du Marin !!!  

Mais soyons francs, l’euphorie des débuts est entrecoupée de moments
de questionnements et de découragement.  

Les premiers mouillages rouleurs mal choisis qui donnent le mal de mer sans même naviguer  

les premières navigations avec notre petit arnaché dans son siège auto
fixé dans le cockpit qui en temps normal nous aurait valu une
dénonciation au SPJ  

les premières rafales où l’on faisait semblant d’être détendus alors qu’on priait intérieurement pour que ça s’arrête de monter

le premier décrochage de notre ancre au mouillage où on a bien failli
percuter les voisins  

et la navigation qui a suivi, sous orage et sans visibilité dans un chenal,
où on se rend compte que quand même un GPS externe, ce serait bien…

les premiers passages de canaux qui semblent interminables et le vomis dans le carré, dans le cockpit et sur les habits…  

Ouai … qu’est-ce qu’on fout là ?  

De retour à la civilisation, on barjaque sur les pontons pour se ragaillardir ou se renseigner sur l’étape suivante.  

Radio ponton a l’avantage de ses inconvénients.  

Si c’est simple de se faire des rencontres et d’échanger des infos,
c’est tout aussi facile de se laisser influencer.  

Les anecdotes enflent vite et le mouillage favori du premier sera
peut-être l’endroit à éviter pour le suivant.  

Règle n° 1 à bord de Django : écouter – trier – se faire confiance

Le bateau, c’est la liberté qu’on se disait !  

Oui, mais …  

Vivre à bord en famille, sans être tenus par les contraintes d’une société, c’est se lancer dans une aventure où on devra être capables de ne compter que sur nous en mer. Et on compte bien s’y préparer.  

Mais à nos débuts, la simple gestion du quotidien ancrés à 5 minutes de
la terre est déjà un challenge !  

Tout prend du temps et nous demande de l’organisation, des
discussions, des tonnes de discussions.  

Avoir oublier le pain, descendre le dinghy des bossoirs, remplir le
réservoir d’essence, s’équiper, faire le tour du bateau pour tout fermer, équiper le petit de son gilet et de crème solaire, faire 20 minutes de trajet sous un soleil pré-orageux et se rendre compte qu’ici, ce jour-ci dans ce pays là, c’est férié, tout est fermé.

On tente notre pain à bord, mais cette foutue pâte ne monte jamais.  

Trouver une pièce de rechange
fabriquée en Suède pour un moteur vieux de 18 ans vendue en par une boîte anglaise facturée à une adresse en
Suisse et expédiée dans une île du Commonwealth en cherchant le moyen « d’alléger » 40% de TVA peut rapidement occuper vos journées.    

Lever l’ancre à 9 heure
pour « juste vite » aller faire le plein des tanks d’eau et d’essence avant d’aller à terre. Quand le catamaran qui squatte le ponton dégage enfin,
la pompe à essence est hs. La prochaine se trouve à 120 miles.
Quant à l’eau, pas de pression dans le tuyau. 400 litres plus tard, il est 13 heures. Il fait une cuite terrible.
Le temps de retourner au mouillage, ce sera l’heure de la sieste du petit et la journée sera quasi pliée.

Mais on a de l’eau pour les pâtes !

Faire l’avitaillement
prend des siècles. Se rendre au marché (dinghy-bus), charger le chariot,
le bus, le dinghy, rentrer, tout transborder dans le bateau.
Puis, en bons élèves, au début (…), on vire tous les cartons et on désinfecte tout pour éviter l’invasion de cafards.  

Quant à la pêche, on a refait la peinture de la jupe arrière du bateau
avec le sang de ce pauvre thazard qu’on a sauvagement assommé en
même temps qu’on a traumatisé notre fils.

Si on fait naufrage, tant pis, on suçotera de la sargasse.  

Grosse émotion à bord ! Valentin se souvient bien de la gueule de la bête… Nos potes de Taipe nous ont aidé à le dépiauter et il a finit au grill, partagé avec les bateaux du mouillage de l’îlet Cabrit, aux Saintes.

 


Vous l’aurez compris, les Robinsons ont du plomb du l’aile !  

Dans quoi on se lance ?  

On est sacrément habitués à rentabiliser notre temps,
à ce que ça fonctionne facilement et à ce que tout soit accessible rapidement.  

Là, on doit apprendre un autre fonctionnement, une autre notion du
temps.  

Le prix de cette liberté rêvée est celui de la responsabilité à la fois
de notre petit gars et du bateau sans avoir l’expérience ni de l’un
ni de l’autre.  

On découvre le monde de la navigation en même temps que celui
des nouveaux parents.  

À nos débuts qui dureront … disons bien 6 à 9 mois, bateau et bébé nous demandent une vigilance constante et crevante.    

En étant H24 ensemble, ça se traduit en tensions pas évidentes à gérer.   
Paradoxalement, on a du mal se décoller les uns des autres
certainement parce qu’on est loin de ce qu’on connait.    

À ce stade, beaucoup de tension.

Le rêve en prend un coup et on n’imagine pas s’éloigner plus que ça de
la civilisation…    

Notre parade contre ces difficultés d’adaptation, se tailler faire du
snorkeling et célébrer les petites victoires quotidiennes !  

Un rhum par ci, un bon petit plat par là, un peu de tourisme à terre,
un téléphone aux potes et c’est reparti.  
 
On trinque après avoir croisé 7 fois notre trace pour baptisé Django de son nouveau nom. Au-delà de la référence au film de Tarantino, ça veut dire « celui qui s’éveille ».

Le fun d’arriver dans un nouvel endroit après une belle navigation est à chaque fois vraiment unique.  

1 mois après le baptême du bateau, on fêtait notre première traversée jusqu’en Guadeloupe, plutôt fiers ! Ici, Valentin en pleine récupération, aux Saintes, bourg de Terre-de-Haut.

Les rencontres avec des bateaux-copains nous font du bien.

Ils ont les mêmes questions que nous.  

La vie de famille à bord n’est un long fleuve tranquille pour personne !

Règle n° 2 : com-mu-ni-quer  

Et si ça ne suffit pas, les éléments naturels sont là pour nous remettre à l’ordre et nous demander de faire équipe quand les choses se corsent.

Comme Beryl, premier cyclone de la saison 2018 qui fonçait droit sur nous alors qu’on traînait encore notre coque en Martinique.  

Pour l’occasion, on a désarmé le bateau, on a triplé ses amarres sur une bouée récente censée résister à 60 nœuds de vent dans le trou à cyclone du Marin et on a pris une chambre d’hôte.  

Beryl a dévié sa route et on a pas eu une brique d’air pendant 2 jours … mais il nous a rappelé qu’il était temps de descendre sous le 13° Nord.  

Règle n° 3 : anticiper, anticiper, anticiper

La saison cyclonique nous mène à Grenade, statistiquement située en dessous du passage des ouragans qui arrivent de l’Atlantique de juin à novembre.  

Tout est histoire de tempo et tandis que je me réjouis de pouvoir nous arrêter un peu, cette longue période au même endroit rend Jojo nerveux.

Lui qui s’imaginait voguer de mouillage en mouillage et avaler les miles déchante et prend sur lui.

Finalement, la période passera vite et sera mise à profit pour continuer à nous préparer et à aménager notre bateau.  

Au programme :

– révision de nos procédures de sécurité
– navigations régulières pour s’entraîner et rester amariner
– antifouling
– et refit moteur !  

Une histoire en soi de se lancer dans une révision complète sur un chantier de terre plein de la petite île de Carriacou, ne serait-ce que pour s’assurer d’avoir l’outillage !  

Après 6 mois de voyage, notre vie de famille et notre fonctionnement d’équipage se rôde.   C’est sur notre complémentarité qu’on essaie de miser.

Jo à l’entretien et aux réglages en marche, moi à l’intendance et à la navigation. Ensemble pour les manoeuvres et le petit lulu.  

On s’organise des quarts bateau et des quarts bébé, intercalé de boulots de rédaction à l’extérieur pour moi.  

Fin prêts au terme de la saison cyclonique, on a pu relever le nez du guidon et sortons du tourbillon du départ de Suisse.

Le vrai grand départ

Grenade et les îles de rêve des Grenadines restent comme le point du « vrai grand départ ».  

On y a rencontré une véritable communauté de plaisanciers dont de
nombreuses familles avec parfois 3 ou 4 enfants à bord.  

On n’est de loin pas des exceptions.  

Ces familles sont en voyage ou ont fait de la vie à bord leur mode de vie.  
Elles ont toutes des solutions différentes pour donner une instruction à
leurs gamins, souvent l’école par correspondance avec les parents qui
prennent le rôle de prof 2 ou 3 heures par jour quand ils ne naviguent
pas.

Ça laisse le reste de la journée aux enfants pour jouer à l’extérieur.    

Sur les mouillages, on rencontre tous les types de bateaux et autant de
variété d’équipages, du jeune loup solitaire danois sur son 8.5 mètre aux actifs couples de retraités américains sur d’énormes catamarans.  

C’est un autre monde.  

Jamais on n’aurait soupçonné cela depuis notre canapé 1 an
auparavant : une communauté de voyageurs, navigateurs et plaisanciers de tous les horizons avec ses codes, son organisation, ses ressources
pour

dégoter du matériel,
préparer une route,
se faire des copains.  

Les gens de bateau se saluent et s’arrêtent facilement pour discuter.

On retrouvera certains d’entre eux de mouillage en mouillage, de pays en pays !  

À Grenade, même les enfants ont leur créneau sur la VHF pour organiser des activités !  

Notre Valentin devient un moussaillon.

Il fête ses 2 ans à Grenade.  

C’est un membre de l’équipage à part entière et il contribue à sa mesure :

– Allumer le feu de mât
– hisser les pavillons de courtoisie
– hisser l’annexe sur ses bossoirs avec papa
– faire les pleins d’eau
– retenir et amarrer le dinghy

Il est top notre mousse !

En navigation, à moins d’une mer calme, il reste beaucoup dans le carré à jouer, se faire raconter des histoires, regarder des dessins animés,
dormir ou à grignoter ses bretzels, son astuce perso contre le mal de
mer !

En octobre 2018, on s’apprête à vivre des moments magiques en famille, à terre et en mer tout au long de la remontée de l’arc antillais.  

Les heures de plages paradisiaques

les virées dans la forêt primaire

les baignades sous les cascades

le snorkeling sur les récifs de coraux dans des eaux turquoise

la rencontre avec des animaux marins et terrestres

les ambiances de couchers de soleil et celle incroyable des levers de lune

les mouillages abrités par d’énormes barrières de récifs, face à l’océan
Atlantique fâché par 35 nœuds de vent aux Tobago Cays…  

Chaque jour est un nouveau spectacle offert par la nature.  

En moyenne, on naviguera 1 fois par semaine depuis l’automne 2018.

Notre remontée de l’arc antillais sera aussi marquée par une première « claque » prise dans le canal de la Dominique.  

À postériori, on admet qu’on était pressés par l’envie de retrouver notre pote Renaud, premier courageux visiteur depuis notre départ de Suisse et avoir clairement sous estimé Mère Téo. Quels couillons !

Notre chronique de bord de l’époque disait :

 » … Mardi 13 novembre
Le bulletin météo pris la veille prévoit un régime d’alizés faible à modéré, instable avec des vents 3-4 beaufort, fraîchissant 5, localement 6 sous orages et dans les canaux et une mer belle à agitée.
On mange 30 à 35 kn de vent régulier avec de sérieuses rafales à 40kn et une pluie incessante à peine après avoir passé le premier tiers du canal de la Dominique. Après moultes hésitations superflues, on se décide à réduire la voilure. Thalasso a fait demi-tour après une avarie d’écoute de GV.
De 1 ris – trinquette, on passera sous GV 2 ris seuls. On palabre pour orga
niser la manœuvre quand Django, comme agaçé, part sur l’autre bord pendant un moment d’inattention du barreur. À la cape les gars ! Grand moment que de devoir affaler la trinquette avec 39° de fièvre. Heureusement que la mer n’est pas trop formée. On a oublié de reprendre la contre-écoute au winch ce qui aurait éviter à dame trinquette de partiellement passer par-dessus bord. Pas de mal heureusement.
Mon Valentin est gagné par le sommeil dès qu’on aborde l’île, qui nous abrite du vent désormais. On pousse alors encore 3 heures au nord pour passer la nuit à Prince Rupert Bay sous pavillon jaune.


Mercredi 14 novembre
Équipage ragaillardi et décidé à en découdre. On se repart dans la bagarre avec nos 2 ris, le vent ayant molli à 25 nœuds de moyenne (après avoir passé les rafales de 0 à 30 nœuds en 3 secondes du nord de l’île…). Cap plein nord sur Pointe-à-Pitre, au travers.
La mer se creuse et se creuse devenant forte à très forte. Autant dire que par le travers à 7 nœuds sous 2 ris et un petit bout de génois, ça devient vraiment flippant. J’appelle Jo en renfort. Il faut reprendre la barre et évaluer l’équilibre du voilier.  Ce n’est vraiment pas évident de mettre assez de toile

pour lui donner de la puissance mais pas trop pour éviter de lui casser le
mât ou autre chose.
On décide d’abattre sur les Saintes à 2 heures d’ici et filons, bien stables, comme un TGV. Mon petit gaillard bouquine en grignotant ses bretzels.

On a une admiration sans borne pour cet enfant qui pas une fois ne se plaint bien qu’il ne puisse qu’en avoir marre d’être cantonné à ce petit espace, allongé pour s’éviter un haut-le-cœur.
On s’empresse de l’amener à la place de jeux à peine arriver à
Terre-de-Haut. Ses petites cannes engourdies le trahissent quelques fois de retour à terre, n’arrivant pas à suivre sa volonté de courir comme un cheval sauvage qui retrouve la liberté.
Ce qui ne l’arrête en tout cas pas.
Demain c’est repos pour tout le monde, contrôle et recontrôle météo puis balade à Fort Napoléon pour regarder passer le 1er Multi 50
dans le canal des Saintes… »

Règle n°4, la plus utilisée :
Quand tu te poses la question, fais-le !!!  

Règle n°5 :

Quand tu doutes, à la vie comme à la mer,
mets-toi à la cape (arrête-toi) !    

Règle n°6 :

on évite les rendez-vous et
on part avec le moins de mer
possible  

On a encore bien des choses à apprendre.  

Sacrée récompense tout de même de vivre des retrouvailles en même
temps que l’arrivée d’une course au large mythique !

Et de pouvoir saluer Alan Roura et sa Fabrique !

Décembre est là et voilà déjà 1 an qu’on est partis.  

Ces premières fêtes loin de la famille et des amis sont un peu
particulières. Il y aura des cadeaux et une ou deux guirlandes mais ça va être difficile de transmettre les traditions telles qu’on les connait à notre fiston.  

On est particulièrement content que notre pote Christian soit là du coup. On fêtera notre premier Noël à bord sur la côte ouest de la Guadeloupe.

Cette année, les ballades dans la jungle, les apéros à la plage et
sur les bateau-copains remplacent les sorties à moins 10° sur les marché
de Noël. C’est plutôt pas mal !  

On a même fait la raclette avec nos compatriotes de Placebo !

Voyage et découvertes

Début 2019, à l’escale de Saint-Martin, on s’équipera d’une balise de détresse, d’une VHF portable, de filtres à eaux, d’un GPS extérieur et
recherchons une nouvelle cuve à eaux noirs.

Cap à l’ouest ensuite pour retrouver nos familles en février en
République Dominicaine.  

On songe vaguement à continuer notre route en direction des USA dans l’année mais force est de constater qu’on a sous-estimé l’impact de ce
changement de vie et qu’on a besoin de naviguer doucement pour que cela reste un plaisir.  

Et si on restait en terrain connu ?

C’est décidé, nous passerons encore une saison dans les petites Antilles !

C’était sans compter avec notre apéro avec Cheryl et Morgan de
Nomadica au mouillage de Saint-Martin.

Également parents d’un tout petit, on profite de leurs conseils avisés sachant que la vie à bord est leur monde depuis toujours pour lui et depuis
presque 15 ans pour elle.

Avec l’arrivée de leur garçon, ils retournent vivre à Saint-Hélène, via les USA, les Açores et la côte ouest africaine sans équipier.  

Maintenant qu’on sait où se trouve St-Hélène, on leur expose notre projet repoussé de navigation sur la côte est américaine.  

Ils nous parlent d’une route alternative par les Grandes Antilles et
l’Amérique centrale pour passer la saison cyclonique au Guatemala.  

Mmmhhh …. La Jamaïque, Cuba, le Mexique, le Belize dont on ignorait
jusqu’à l’existence, la remontée du Rio Dulce au Guatemala …  

ça fait rêver … on se lance ?

On aura les vagues et le vent avec nous ! Go !  

Nous quittons Saint-Martin et la zone de confort fraîchement acquise
des petites Antilles super sociales.  

On troque des navigations courtes et attaquons notre première traversée de 3 jours jusqu’à la côte sud de la République Dominicaine doublement heureux puisqu’en plus d’avoir effectuer notre magnifique première
grande navigation sans encombre, nous y retrouvons les parents.  

Dans les Grandes Antilles, c’est un autre jeu.

Les distances entre les étapes sont plus importantes, les contrôles des autorités s’intensifient, certainement à cause du narcotrafic.  

Le contrôle du trafic maritime est géré par l’armée la plupart du temps. On est loin de la douce culture de la plaisance qu’on connaît.  

Dans chaque pays, de la République Dominicaine au  Guatemala, on aura à faire avec les représentant de 5 ou 6 bureaux différents à l’entrée :
autorités portuaires, douanes, immigration, autorités sanitaires, etc…

Tous les mouvements doivent être signalés et les entrées et sorties se
font uniquement par les ports désignés.  

Cela dit, l’accueil a toujours été cordial et avec un peu de patience, tout
se passe bien.  

Excepté sur les sublimes -et désertes- récifs du sud de Cuba, nous optons désormais à 90% pour des arrêts en marinas sur toute la suite du trajet.

Au niveau navigation et vie à bord, tout devient plus fluide.

On décode mieux les zones, les fonds, les vents et devenons au point pour régler nos voiles aux petits oignons.  

La vie à bord continue même sur des longues navigations.

Je garderai en mémoire mon Valentin qui débarque dans le cockpit, son oreiller sous le bras, lors d’une navigation de nuit au moteur entre Haïti et la Jamaïque, histoire de regarder les étoiles.  

C’est à Cuba qu’on deviendra les rois du pain qui enfin monte et qu’on fait même quelques progrès en pêche …  

Lorsqu’on arrive à la Isla Mujer au Mexique en mai 2019, on est fiers
comme des coqs.

On en a pris plein les yeux depuis la RepDom, on se sent à l’aise, on a
géré des navigations de plus en plus longues malgré le Gulf stream.  

Quelques pépins de santé nous rappelle qu’il faut s’arrêter et on ne se
fait pas prier.  

Mais on a tendance à oublier qu’il reste encore une sacrée distance
jusqu’au Guatemala et que la saison cyclonique approche à grands pas …  

Premier bilan

En mai 2019, voilà plus d’un an qu’on est en route. Une année qui en vaut 5 en intensité. On se connait par cœur.

Ce voyage formate notre gosse qu’on voit super à l’aise avec les gens, agile, réceptif. Son bateau est sa maison, son refuge. Comme on dit, curieux petit, curieux pour la vie ! On est dans le tir.

Néanmoins, il accuse le coup au niveau physiologique à chaque navigation et il a besoin de se dépenser à terre, de préférence sur une place de jeux pleine de gamins.

De notre côté, on a gagné en capacité d’adaptation, pour sûr ! On est ravis de notre bateau.

On a l’impression d’avoir fait le plus dur et d’à peine pouvoir commencer à vivre pleinement cette vie de famille en bateau.

Nous touchons à peine du doigt ce monde nouveau. Tout devient plus simple. Il y a encore tellement à apprendre et on a envie de continuer maintenant que nous avons plus d’aisance.

Pour que l’aventure se poursuive, on doit ralentir, privilégier le cabotage et les longues étapes.

Sans oublier qu’on adore les mouillages sauvages seuls au monde mais on aime aussi rencontrer du monde.

Surtout, nous avons chacun besoin de garder chacun une activité et un espace bien à soi. Notre vie continue de s’organiser autour de ce bateau tant que l’envie est là, que les finances et la santé nous le permettent.

À l’aube de la saison cyclonique 2019, on est au point où on se réjouit tous les deux d’arriver au Rio Dulce pour se poser, sans inquiétude liée à la météo, avec toutes les facilités qu’apportent la proximité de la terre.

Partis pas très en forme du Mexique, la descente jusqu’au Guatemala par le Bélize dont on a une fois encore sous-estimé la difficulté finit de nous conforter dans cette idée.

En amuse-bouche, la peur de notre vie lorsqu’on a cru s’échouer sur un récif non cartographié à peine partis.

Voir le profondimètre passer de 160 à 60, 20, 13, 7, 5, 3 mètres en moins de 30 secondes, c’est quelque chose.

On a rapidement pu manœuvrer pour faire demi-tour heureusement. Puis vient l’entrée, le long de Cozumel, avec les 3 à 4 nœuds de Gulfstream à contre, et du vent de face alors qu’il était annoncé de côté.

Le plat de résistance est un peu lourd, avec la rupture d’une fixation du bossoir (la structure à l’arrière du bateau qui soutien les … kilos de l’annexe) susceptible d’arracher les balcons, tout cela en pleine nuit, dans 20 à 25 nœuds de vent et des creux de 3 mètres (car dans ce coin de mer, il est difficile de naviguer avec moins que ça).

Événement maîtrisé comme un chef par Jo mais sensations garanties, au point qu’on est tous les deux repris par le mal de mer du fait de la frousse et de la fatigue. Seul Valentin reste vaillant …

La sortie de ce menu sera douce avec une fabuleuse descente dans les eaux turquoises du Bélize par l’Inner Channel, abrité par la seconde plus grande barrière de corail au monde, dans des conditions idylliques. La voile telle qu’on l’imagine !

Voilà 7 jours qu’on est à bord. On s’offre une semaine d’escale à Placencia puis attaquons le dessert avec l’entrée du Rio Dulce.

On s’est régalés bien qu’on garde un goût un peu amer du tractage par un bateau de pêche par la drisse de mât pour faire gîter Django et passer ses 2 mètres de quille sur un haut-fonds de sable de 1,70 mètres.

Comme dans un film, on entend les oiseaux et les singes dans la jungle, les gosses abordent Django avec leur cayuco pour nous vendre de l’artisanat local.

Waow ! On n’est pas particulièrement croyants, mais là, on a juste envie de crier MERCI LA VIE !

On découvrira une communauté de plaisanciers cachée au fond de cette jungle humide et épaisse.

L’endroit sera parfait pour le carénage annuel. Viendront aussi la pose de la cuve eau-noirs, les démarches administratives pour l’entrée aux USA, les réparations des selleries et révisions des voiles, les nettoyages à fond, l’antifouling, le polish, le changement de la bague hydrolube, le check du système de barre et du gréement dormant, etc, etc…

Et la suite ?

On prévoit de se remettre en route en octobre prochain pour le nord, peut-être via les atolls du Bélize, les seuls de l’hémisphère nord, via la côte nord de Cuba.

Puis de remonter la côte est américaine en partie par l’Intracoastal Water Way jusqu’à New York et peut-être continuer jusqu’au Canada…

Peut-être … car dans le monde de la mer, on préfère dire qu’on fait route vers, laissant place à l’imprévu.

Finalement, l’important jusqu’ici aura été de se lancer.

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