NOS PREMIERS PAS VERS L’ÉDUCATION LIBRE

NOS PREMIERS PAS VERS L’ÉDUCATION LIBRE

ET L’ÉCOLE ?

Par ces 3 mots, avant même d’avoir quitté le pays, j’entendais sonner le glas de la fin d’une liberté si chère à mon coeur et la fin d’un mode de vie extraordinaire au sens à la fois marginal et fabuleux du terme.

L’école, institution ciment du peuple, allait être en droit d’enjoindre la chair de ma chair à troquer son masque et son tuba contre un sac à dos toujours trop lourd pour rejoindre les rangs.

À 5 ans, c’est le moment de commencer à goûter à l’effort dans la contrainte et à développer la défense physique et psychique pour tenir le programme imposé et les « bases communes » vraisemblablement indispensables à sa survie dans ce monde.

J’entends les « y’a pas le choix », « si on pouvait faire autrement, ça se saurait » résonner au loin comme un postulat de société résignée. À échéance, l’école se pose au milieu de notre chemin comme une évidence et nous empêcherait de poursuivre sur notre lancée haute en couleurs.

Pourtant cette voie du voyage, surtout en bateau et même au soleil, nous enseigne intrinsèquement à composer avec les contraintes extérieures, avec nos propres limites. Le retour de bâton est parfois immédiat si on ne reste pas en éveil, et l’intérêt de comprendre ce qui nous entoure relève de l’indispensable pour avancer sereinement. C’est valable pour le moussaillon. Surtout, ça me semble bien plus fun et vivant que le trio auto-boulot-dodo.

Il a tout juste 4 ans. Au pays, il valserait entre grands-parents et crèche dès le lever du jour. Impensable, un crève-coeur. On ne peut pas vivre comme cela.

 

Comment justifier ce retour potentiel à « la normalité » à mon petit oiseau des Caraïbes qui ne connaît que la vie à bord et la vie en voyage, lui qui se lève et se couche avec le soleil depuis sa première année dans les Antilles ? Lui qui dessine sur le sable des plages, mange le fruit de la pêche (bon ok j’enjolive, on est nuls en pêche…) et ne passe pas un jour sans découvrir les vocales d’une autre langue, les sons d’une musique, les supers pouvoirs d’un animal, la force des vents, les formes d’une architecture nouvelle ou les jeux des enfants de la place ou du bateau d’à côté ?

Comment le regarder dans les yeux et lui vendre l’idée qu’il est bon qu’il apprenne et fasse comme les autres et ce que d’autres jugent nécessaire qu’il apprenne quand l’essence même de notre quotidien repose sur la découverte de la diversité ?

Comment envisager un retour entre 4 murs où l’on recrée superficiellement des expériences

qu’on vit et observe là, dehors ?

Et franchement, en tant que parents, comment lui demander d’avoir confiance en d’autres adultes quand nous-mêmes en doutons, forts de notre expérience de cancres et de nos observations ? Je pense que l’école à l’heure actuelle est en peine et je ne souhaite pas lui confier l’éducation de mon enfant.

Je recherche autre chose pour lui, pour nous.

 

S’IL RESTE AVEC VOUS TOUT LE TEMPS, IL SERA EMPOTÉ ! 

Une amie chère m’a dit un jour « avant j’avais des principes, aujourd’hui j’ai des enfants ». Elle a tout dit ! Si nous devions n’avoir qu’une ligne de conduite, ce serait celle de préserver la joie pétillante caractéristique des enfants chez notre petit. Pourquoi est-ce si urgent de l’envoyer au feu ?

En bonne maman poule, qu’est-ce que j’aimerais pouvoir le protéger de tout ce qui pourrait l’abîmer durablement. Ma seule option après la baguette (ou le bâton, c’est selon…) c’est d’essayer de l’équiper de cette précieuse faculté à reconnaître ce que ça dit dedans.

Vous savez, ce truc un peu magique (certains disent « la petite voix »), ces picotements au bas du dos, cette connexion, cet instinct qui vous guide vers qui/quoi approcher ou vous alerte sur ce qu’il faut éviter ?

Plutôt que de se forger dans le dur de ce qu’on n’a pas choisi (oh les cours d’allemand…), j’aimerais lui laisser ce temps béni de l’enfance pour découvrir ce qui existe et ce qu’il aime. J’aimerai lui laisser du temps pour jouer, faculté très sérieuse parce qu’on n’a rien inventé de mieux que ce dont la Nature nous a doté pour apprendre, par observation, imitation, expérimentation et toujours dans la joie pour au final comprendre l’intérêt de comprendre ce que d’autres avant lui ont découvert ou inventé.

Et partons du principe qu’on est capable – à tout âge- de se frotter à toutes les résistances pour arriver à nos fins quand quelque chose nous intéresse.

Le temps, comme l’argent, est trop précieux pour le gaspiller dans ce qui est secondaire. Va fils ! Feu ! À fond dans ce que tu aimes ! Voilà notre ligne en filigrane. 

Ce voyage nous a démontré qu’il est possible d’organiser une vie de famille riche et pleine basée sur un rythme où l’on compose avec ce que chacun amène et non sur un horaire auquel il faut se formater pour tenir la course à la performance avec l’extérieur.

La littérature spécialisée parle souvent « d’attachement sécure ». Effectivement, comment se sentir en sécurité dans toutes les sphères où j’évoluerai si mon premier cercle ne tourne pas rond ? Notre famille est son socle où nous faisons au mieux pour qu’il puisse être en totale confiance, sans condition pour être aimé.

Certes avoir ses deux parents disponibles évite de devoir attirer l’attention en faisant des conneries. Le geste est plus sûr quand on a pas le poids du regard sur soi et la crainte de la réprimande.

Encore faut-il être BIEN ensemble. Mon optique est de ne pas avoir à se supporter les uns les autres ou devoir peser nos mots, mais bien avoir du respect et du plaisir véritable à être ensemble. La suite en découle.

Nos règles, nos choix, notre organisation quotidienne et financière.

Ca marche pour tout le monde ou ça ne marche pas.

Et rien, ni choux de Bruxelles ni devoir, ne justifieront d’abîmer nos relations.

Au final, notre gamin la ramène tout le temps, il est capable de tenir le regard d’un adulte ou d’un enfant, de l’écouter, de le questionner avec assurance. Il dit ses limites. C’est franchement beau à voir et mes jupons se portent bien, merci.

 

« POURQUOI TU NE VEUX PAS QU’IL AILLE À L´ÉCOLE ? T’AS PEUR QU’IL APPRENNE DES CHOSES ? »

Quel parent ne voudrait pas que son enfant soit capable de lire, compter, écrire ? Ce sont effectivement des clés fondamentales pour comprendre ce qui nous entoure et cette compréhension est au coeur de mes préoccupations éducatives.

Je souhaite bien sûr « l’équiper » de ces compétences et de bien d’autres, même jugées secondaires par ceux-là même qui établissent des plans d’études formatés. Ce que je remets en question c’est l’évaluation d’un enfant dans une logique qui relève plus de la productivité que du développement. Redites-moi à quel point est-ce que ça a du sens qu’il sache écrire la lettre M en minuscule à 5 ans 23 jours et 18 heures ?

Les apprentissages se font toute la vie. Certains resteront sur les rails enchaînant études, famille, progression professionnelle. D’autres traverseront les mêmes étapes peut-être dans un ordre différent. Ou pas. Ils n’ont pas moins de valeur ou de capacités pour autant. Si ?

Vient ensuite la méthode d’apprentissage. En toute honnêteté, si la perspective de devoir écouter ce qu’on lui livre comme vérité absolue cloué sur une chaise 6 à 8 heures par jour me crispe, la vision de devoir me battre à la table du carré en mode « école à la maison » pour lui faire rentrer l’alphabète dans le crâne ne m’enchante pas non plus. Cela ne ferait que déplacer le problème. 

Je prends le pari de faire confiance en sa curiosité naturelle et en son potentiel de petit humain. Vous connaissez sûrement les poupées russes ? Parfois j’ai le sentiment qu’il a en lui comme des boîtes de cadeau, renfermant des boîtes de cadeaux, chacune contenant une capacité, une compétence, un intérêt à explorer au gré de sa croissance. Reste à être là, y être attentif pour assurer l’environnement propice au petit explorateur.  

J’aime bien l’image d’une « grande Maison du Monde » qu’on visiterait ensemble pour illustrer ma vision de mon rôle de parent. Mon boulot est d’ouvrir les volets, fenêtre après fenêtre. Derrière chacune, une scène ou une image. S’il est intéressé par ce qu’il voit, nous creusons le sujet ensemble. Cela va l’observation de la fourmi à l’étoile, de l’arbre au supertanker, de compréhension de la réaction d’un copain à la confection de la pâte à crêpe. Vous voyez l’idée ?

Les fondamentaux s’apprennent au travers de tout ce que l’on vit. Je le revois lire le nom sur la coque du bateau des voisins alors qu’on s’arrêtait dire bonjour, compter les dodos jusqu’à destination, troquer son jouet à Cuba ou tenter de comprendre pourquoi quelqu’un a coupé le bec de ce toucan au Costa Rica.

Parfois j’y vais de mon laïus pour lui expliquer quelque chose et me dit qu’il ne doit entendre qu’un long blablabla. Et souvent c’est le cas ! Mais parfois, cette petite graine semée ressurgit sans prévenir des mois plus tard.

 

IL N’AURA PAS DE COPAINS !

J’aimerais pouvoir affirmer que c’est faux, qu’on fait énormément de rencontres, que nous sortons beaucoup. Ce serait vrai, mais incomplet. 

Lorsque nous étions en bateau, nous avons rencontré une super communauté de boaters et de nombreuses familles en bateau. Il ne tenait qu’à nous de faire le premier pas et d’organiser un play-date à la plage. Par définition, ces familles de voyageurs partent tôt ou tard en fonction des saisons, des programmes.

Occasionnellement, nos chemins se recroiseront et ce sera génial ! 

En vérité, cet aspect social est celui qui nous a poussé à continuer notre aventure à terre en mai dernier. Nous sommes arrivés à un point où le besoin de voir les copains régulièrement s’est fait sentir.

Ceci et le besoin de digérer ces 3 ans de voyage, de se renouveler avec plus d’espace chacun de notre côté pour mûrir nos propres projets après plusieurs années à 100% ensemble.

De la nous avons cherché un endroit où nous pourrions faire du unschooling ensemble et cela nous a mené dans une école libre au Costa Rica. Là-bas, beaucoup de copains de 3 à 15 ans, des espaces ouverts au lieux des classes, des accompagnants au lieu des profs.

Nous continuons de voyager et conservons la liberté de partir explorer le pays pour 1 jour, 1 mois ou plus quand nous le pouvons et souhaitons.

 

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