Soudain, seuls

Soudain, seuls

Le roman d’aventure d’Isabelle Autissier

Le quotidien vous lasse et les récits d’aventure vous excitent ? Une part de vous rêve d’explorer le monde sauvage et vous aspirez à larguer les amarres pour le bout du monde. Le feriez-vous avec votre moitié que vous pensez si bien connaître ?

C’est l’histoire de Louise et Ludovic, partis sillonner sous les grandes latitudes sud. Soudain, ils restent seuls, sans bateau, sur une île perdue de Patagonie. Dans ces conditions extrêmes, chacun des membres du couple révélera sa nature profonde et son potentiel.

Dans un style cinématographique qu’on lit d’une traite, le roman de la navigatrice Isabelle Autissier vous emmène dans les confins d’une terre brute de décoffrage ou tout est survie.

Seriez-vous plutôt Louise ou Ludovic ?

Louise est lunaire. Introvertie, mesurée, casanière, son calme apparent cache cependant deux feux intérieurs.

Le premier est celui pour Ludovic qui la fascine. Le second est sa passion pour la montagne.

Bien que menue, sa pratique dans laquelle elle excelle lui a sculpté un corps agile et nerveux typique de ce sport. Cela ne change en rien le regard que porte sa famille sur elle. Elle reste « la petite ».

Ludovic est son pendant solaire. Elle aime d’ailleurs sa personnalité joyeuse que rien ne semble atteindre, son optimisme et son sourire. Ce beau gosse trace son chemin dans la vie avec beaucoup de fluidité. Fils d’une famille aisée, professionnel de la communication, c’est un rêveur passionné d’aventure.

Il est l’instigateur de leur projet de tour du monde qu’il cultive jusqu’à ce qu’elle accepte de le suivre.

C’est lui qui insista ce jour-là pour partir explorer cette île du bout du monde où seules quelques bases scientifiques se sont ponctuellement animées. Le bateau était au mouillage et le ciel se chargeait. Malgré tout, c’est lui encore qui a insisté pour poursuivre leur randonnée d’exploration.

Cette complémentarité va être mise à l’épreuve lorsqu’ils découvrent avec stupéfaction que la tempête a décroché l’ancre de leur bateau. Le mouillage est vide. Ils sont désormais pour seuls, sans moyens de communication, avec comme compagnons des manchots, des rats, des oiseaux.

L’organisation de la survie

Le récit nous plonge ensuite dans les efforts physiques et les souffrances du quotidien. Sur fond de chasse et de soupe de manchot, les deux protagonistes passent par des phases de colère, d’espoir et de désespoir.

Chacun développe ses propres mécanismes de défense pour ne pas sombrer. Le maintien d’une sorte de routine de l’extrême les tient en vie.

Dans l’urgence de la survie, chacun a une vision différente de ce qu’il faut faire. Ils se disputent et s’isolent. Poussés dans leurs retranchements, le couple se distance, revisitant des divergences passées.

L’évolution du personnage féminin de Louise vers la découverte d’une part de soi aussi effrayante que puissante est particulièrement prenante.

Le point de rupture

Plus le temps passe, plus leur santé se détériore et leur volonté de survie s’égrène. Leur lecture de leur situation est de plus en plus différente mais leur quotidien est invariablement une bataille pour manger et avoir chaud.

L’hiver approche et les conditions se renforcent encore. La nourriture devient de plus en plus rare. Il est partisan de préserver leur routine salutaire.

Poussée par son instinct, elle décide de partir à la recherche d’une base scientifique pour trouver des vivres et des moyens de communication.

Le retour à terre, un second choc

Les médias seront assoiffés de ce récit de survie lors du retour à terre.

Cependant, comme très souvent dans les récits de rescapés, les protagonistes doivent décider de lever ou non les zones d’ombres et les secrets sur la réalité des évènements.

Là où les foules attendent le sensationnel et l’héroïsme, est-ce recevable de parler d’instinct individuel, pour ne pas dire égoïste, de survie si humain ?

L’histoire se ferme sur un nouveau défi : celui de se relier à nouveau à la société après une telle expérience.

Une histoire qui bouleverse

L’écriture de la navigatrice transmet avec force et détails la connaissance de la nature brutale des mers du Sud.

Sa propre expérience a sans aucun doute nourri sa capacité à faire ressentir la souffrance physique et psychique des personnages.

La question de savoir ce que j’aurais fait à leur place m’est passée plusieurs fois par la tête tout au long de ma lecture.

Finalement, ce roman captivant m’a laissé avec une réflexion encore en cours : ne préférons-nous pas l’idée romancée de l’aventure plutôt que son expérience ?

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