Border Run au Nicaragua

En route pour Granada 
Un despote et sa reine au pouvoir

Une composante majeure à prendre en compte dans le choix de la route est celle des visas.

Passeports en poche, nos 3 petits sacs à dos paquetés et nos playlists à jour, on attend seuls comme 3 couillons faussement détendus l’arrivée du bus au bord d’une nationale au petit matin.

Ce sont les premiers signes de ce qu’on appelle entre nous le « Costa Croisières » symptôme. À 20 ans, le voyage sac au dos plein d’imprévus, c’est la vie. Vingt ans plus tard avec un petit, avouons qu’on aime bien que ça fonctionne.

Officiellement, le gouvernement du Costa Rica octroie 3 mois de visa touristique.

Officieusement, de nombreux étrangers le renouvelle régulièrement en allant faire le tour du poteau à la frontière nicaraguayenne à l’échéance moyennant quelques billets.

Ce manège tout à fait discutable sur le plan politico-économique semble arranger pas mal de monde.

Notre réalité de touristes est plutôt comique et assurément incomparable à celle que vivent de nombreux Nicaraguayens qui sont en attente de passer la frontière en direction du Costa Rica pour sauver leurs peaux.

Ce qu’on ignore à ce moment, c’est qu’on devra négocier plus d’une heure à notre retour à la douane costaricaine. Mi culpa. J’avais joint le mauvais document d’assurance voyage à ma demande de QR code, le pass santé. Une erreur de débutante !

Depuis les soulèvements de 2018, le Costa Rica enregistre une recrudescence des demandes d’asile politique et un mouvement migratoire sans cesse en hausse pour des raisons socioéconomiques.

Le peuple était sorti manifester dans la rue contre une réforme sociale. Elle visait à augmenter les cotisations tout en baissant les rentes pour combler un gigantesque déficit des finances publiques corrompues et selon notre guide au volcan Masaya, également celles d’entreprises privées.

« – D’abord ils tiraient des balles à blanc. Puis ils ont tiré de vraies balles » nous commente-t’ il.

« – Et toi ? Est-ce que tu es sorti manifester ? » je le questionne.

« – Au début oui, ensuite non. Je ne voulais pas mourir. » Il conclut.

Depuis, toute forme d’opposition ou de manifestation est violemment réprimée.

Les postes clé du gouvernement sont tous occupés par des proches du président à l’image de sa femme, vice-présidente. Lors des élections de 2021, l’opposition a été muselée, les candidats incarcérés et les scrutins verrouillés.

Voilà qui donne matière à réflexion en regardant le paysage pendant les longues heures de bus où les attentes interminables et les coups de chaud s’alternent.

Premières impressions

L’âme voyageuse préfère la poésie et s’évade vite. Nous sommes au cœur de l’Amérique Centrale.

Nos pensées sont tournées vers la perspective de découvrir le cratère bouillonnant de lac de lave du volcan Masaya.

Pour l’instant l’ébullition est celle de la frontière nicaraguayenne.

Passés les postes de contrôle, on aperçoit par la fenêtre les vendeuses de boissons et biscuits secs et sucrés en tous genres qui occupent le terrain.

Pas arrêtées par les rugissements et les fumées des moteurs des camions qui avancent à la chaîne, elles crient, interpellent, s’offusquent, se résignent en mâchouillant un palito.

Les militaires, fusils en bandoulière, slaloment impassibles dans ce tohu-bohu.

 

Les rives peu habitées du lac Nicaragua replongent le bus dans le calme.

C’est le campo, la campagne.

Des dizaines d’éoliennes balisent le chemin vers le nord.

Les volcans Maderas et Concepción de l’île Ometepe pointent comme deux tétons au milieu du lac.

Leur végétation a l’aspect d’un brocoli.

Granada, la Gran Sultana

 

 « Granada ! » crie le chauffeur.

Déjà ?

Valentin a les yeux carrés à force de dessins animés. Jo et moi partons en mission spéléo d’urgence pour retrouver ses godasses glissées sous les sièges.

On saute du bus comme on sort d’un carrousel.

La chaleur douce de fin de journée et une légère brise nous enveloppent. La nuit tombe. Les gens nous saluent sur le chemin de notre guesthouse dos cuadras (deux pâtés de maisons) plus bas.

Une petite porte de bois sombre et épais s’ouvre sur une énorme cour intérieure de style colonial. De jeunes backpackers chillent au bord de la piscine, frimant un peu en énumérant les pays qu’ils ont visité.

Je scrute les toits en tuiles, dès fois que Zorro passe par ici. De là, la vue royale sur la ville et la Cathédrale en ferait un point de passage obligé en cas de course poursuite avec le Sergent Garcia.

Demain, on partira se perdre dans ses rues colorées, son histoire. On se baladera entre les 365 isletas du lac, toutes créés par une avalanche de pierres du volcan Mombacho. Demain.

Incendiée, détruite, pillée, la ville de Granada a subi les assauts des Conquistadores et des pirates espagnoles, hollandais et français.

Commerce et piraterie

depuis des siècles

 

Une attaque notable est celle du redoutable Capitaine et pirate Henry Morgan.

Après avoir remonté le fleuve San Juan depuis la Mer des Caraïbes jusqu’à Granada, il pille la ville, coule la flotte espagnole et s’enfuit par la rivière Coco.  

Il s’alliera ensuite avec les indigènes Miskitos qui luttent contre l’invasion des Conquistadores.

L’histoire semble se répéter avec une distribution des rôles bien plus sordides toutefois.

Le nouveau « pirate » est chinois.

Son épée est son porte-monnaie et il pactise avec les dirigeants en poste. Et les indigènes sont expulsés de gré ou de force.

En effet, Morgan utilisait alors ce qui aurait pu devenir ces dernières années une voie maritime capable de concurrencer le Panama avec le « Grand Canal interocéanique ».

Le gouvernement du Nicaragua s’est doté d’une loi qui lui permet d’exproprier les riverains gênants sans droit de recours.

Le groupe chinois qui bénéficiait d’une concession territoriale de 100 ans n’existe plus et le projet est au point mort. La nature ici est en sursis ainsi que ses habitants.

Les requins du lac Nicaragua

Les eaux troubles du lac Nicaragua ou Cocibolca sont réputées pour avoir abrité des requins taureau capables de s’adapter en eaux douces. 

 Cette faculté reste encore très mystérieuse aux yeux des scientifiques !

Une autre espèce aux dents longues sont les propriétaires de certaines isletas.

Pour la plupart les plus grandes fortunes du pays selon notre jeune Capitaine.

Notre jeune capitaine nous en a proposé une pour 80’000$ !

Avis aux amateurs.

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